Tania Magy, un voyage en europe pour préparer la Biennale de Venise, pavillon Rom, 2011

Titre :
Retour du voyage en Europe
de « La caravane musée de l’art Rom© »

Tania Magy, asso art Rom de Voyages, Bordeaux-France.



Suite à nos rendez-vous artistiques avec des intellectuels roms européens assez engagés (voir BAK-Call the Whitness, Decade of Roma Inclusion 2005-2015), qui ont eu lieu à Skopje et Shutka-Latifa en Macédoine, j’ai donc entrepris un parcours européen avec la caravane musée pour exporter nos savoirs faire artistiques et rencontrer d’autres artistes roms, gitans, manouches et itinérants.

Depuis février-mars 2011 mon temps s’est donc partagé de la manière suivante :
- Achat, confection, réparation de la caravane art Rom Zingarina pour le nouveau spectacle.
- Voyage d’Etude en Europe (projet Romeurope).

D’abord j’ai été accueillie en résidence chez des membres de notre association : Djan de la caravane vannerie, Marinouch’ la violoniste d’Ashock-Chakra. C’était à Belin Beliet en Gironde puis à Toulouse et en Midi Pyrénées à Argein chez la Koumpania (qui donne rdv le 3 sept 2011 mais qui n'a pas de financement plasticiens).
Ce qui a motivé ce départ c’est notre lutte pour les droits des Gens du Voyage, des Roms. Pour subsister en tant que nomade, suite aux manifestations contre la loi LOPPSI2.
Claire Auzias et les autres membres du collectif nous sommes retrouvés puis nous avons repris nos recherches avant de nous revoir en avril 2011 à Welkome In Tziganie à Auch.




Mon voyage s’est donc déroulé en alternance entre des temps de création pour la petite caravane art Rom Zingarina (aménagement intérieur, peintures extérieures en hommage à Bernard Buffet pour qui j’avais rédigé un article lorsqu’il résidait au Japon), prise de position pour la période dite Atopyque (voir CAPC de Bordeaux), c'est-à-dire qu’après nos utopies de liberté, nous voici plongés dans ce que je nomme l’art naturel et industriel : l’abondance des transports terrestres et les flux migratoires, les guerres et révolutions.

Lorsque je suis arrivée en Andalousie à Alméria c’était pour rencontrer d’autres artistes gitans, les Kalé (ceux qui travaillent non seulement le Duende, du Flamenco, mais aussi le cuivre dans les troglodytes).



J’ai donc pratiqué l’art de la gravure sur cuivre, mais aussi la forge et le martelage. Puis j’ai assisté à des cours à l’Université d’Alméria et me suis promenée sur la plage magnifique. Les Kalé que j’ai pu rencontrer étaient des artistes, mais je suis aussi allée aux barrios (les bas quartiers) où des logements d’urgence accueillent des populations exilées de maghrébins. J’y ai rencontré des familles qui avaient échappé à des naufrages ainsi que ceux qui parlaient de la Révolution de Jasmin de Tunisie. Certains, surtout des enfants étaient très marqués par ces parcours.

Je pensais donc aux actions de nos collègues et amis bordelais de Médecins du Monde, de Médecins Sans Frontière ou même à Clowns Sans Frontière ; J’ai largement distribué nos « postalès », les petites illustrations d’art Rom à propos de nos activités artistiques.
J’ai retrouvé ensuite, lors de mon chemin retour par Madrid, des familles vivant en bidonville et caravanes avec qui nous avons pratiqué lors d’ateliers d’art Rom.

Lors de mon retour en France je suis passée par Paris à la Cité de la Villette pour prendre des nouvelles certes de la serre de la Cité des Sciences, mais là encore de nos amis artistes ! Une petite citation d’une réunion artistique organisée par la revue Cassandre il y a de cela quelques années m’a fait penser au défilé de ces habitats nomades.

J’ai débuté une série d’œuvres retraçant mon parcours en Espagne avec des citations de faits de guerre (la guerre civile, la guerre jusqu’à Guernica, puisque je me suis arrêtée à Bilbao). Il s’agit de nombreuses traces laissées par des familles qui cherchent encore les leurs. Ces traces d’Arte Povera citent les horreurs de toutes les guerres, mais aussi évoquent avec poésie la survivance, l’espoir en l’autre.




Pendant ce temps chaque jour, je confectionnais des traces artistiques, des carnets de route d’art Rom ou de voyage, avec de multiples techniques : stylos, peintures aquarelles, sculptures et petits assemblages.

J’ai repris la route pour le Balkan Trafic de Bruxelles au palais des Beaux Arts, mais n’ai pu exposer faute de temps à mon retour d’Utrecht et Almer (Hollande) et de Dachau (Allemagne).

Ces temps de route et d’expos ont été riches pour moi de découvertes et de rencontres. Ainsi je négocie avec les Editions l’Entre Temps à Paris pour éditer tous mes travaux (quatre carnets de route au total, des ensembles de dessins). Tout ceci m’a permis de préparer Venise.











Texte pour le catalogue voué aux artistes Roms
du Pavillon Rom de la 54è Biennale d’art contemporain
de Venise, mai 2011.

L’art Rom de Tania La Pouni (Magy), romni française,
Installation plastique et assemblages.

Suite à ma thèse réalisée à la Sorbonne en 2002 à propos des pratiques artistiques Tsiganes,
relatives aux arts plastiques, j’offre de manière synthétique des images (effets plastiques),
de parcours qui illuminent les temps partagés d’expositions, de débats, de route, d’ateliers, et surtout de la nature-même de nos diverses pratiques artistiques.
En tant que romni engagée en faveur de nos droits et devoirs, depuis l’enfance, ayant pour but de porter haut nos espoirs,
Je dédie ma thèse à tous ceux et toutes celles qui s’intéressent à nos savoirs faire, à nos familles, qui ont chacune des spécialités artistiques ou artisanales.
Par des installations plastiques (ce que l’université de Paris 1 nomma art contemporain, après Mai 1968), et par leur analyse textuelle, après des temps partagés avec d’Autres, je signifie nos espoirs, nos temps de survie ou d’acceptation avec les cultures dominantes, le fait de parler notre langue, de percevoir tous nos codes, j’affirme que l’art des Roms existe d’un point de vue des Arts Plastiques, plus actif que jamais depuis les années 1980, initié par des auteurs tels que Mutsa-Gartner, Jayat, Trost, Metbach, Guiméra, Hognon, Gatlif… pour les expositions développées en France, j’ai à mon tour avec tous nos collègues, camarades et auteurs privés, défendu notre cause. Que ce soit pour la France ou ailleurs en Europe, nous les Roms sommes souvent discriminés et ce malgré nos diplômes. C’est à cette occasion que je me suis permis, avec l’aval de l’ONUSI de cheminer en Europe et de récolter quelques nouvelles artistiques avant d’en donner à mon tour. Ainsi le dicton rom parle de lui-même : « ton âme s’élève si les savoirs sont gardés à tous jamais en offrant le meilleur à ta communauté ». J’ai eu l’opportunité de parcourir le territoire européen d’Alméria (Espagne) à Almer (Hollande), de commémorer nos morts à Dachau, et de participer à de grands festivals tels que :
L’air des Balkans à Auch,
Balkan Trafic à Bruxelles,
la Roma Touch,
Avignon,
et toutes les formations pédagogiques en direction de nos collègues enseignants d’Aquitaine ou de Savoie.
Ces distances porteuses d’espoir et de vie peuvent évoquer l’espace qui nous est accordé, les rêveries devenant ainsi possibles, le fait de pouvoir parler et visualiser nos créations, nos manières de prier, d’aller vers les personnes sans loi, comme les plus érudits.

L’art Rom se partage, ainsi en trois séquences, trois cimaises qui me sont accordées.

Trois toiles qui relatent un parcours de vie (la mienne ou celle d’autres enfants ou adultes après guerre), un choix de feuilles volantes issues de carnets de route représentant l’actualité d’Art Rom par de temps de respiration et d’activités ludiques ou déterminantes, et pour finir un diaporama réalisé en collectif pour signifier ce qui, à notre époque peut permettre à une minorité de savoir vivre au rythme des Autres sociétés.
Notre minorité est la première en Europe et nous sommes souvent visés.

Je vous souhaite un bon moment et, tout comme Claire Auzias, ou Emmanuel
Filhol, j’évoque aussi notre Samudaripen, pour mémoire.

Je dis à l’inverse qu’il est possible de réaliser d’autres œuvres : mieux transmettre
nos cultures pour des nouveaux étudiants ou professionnels, et je me permets
de donner à voir, non seulement des assemblages mais pourquoi pas mon corps, au repos
dans la nature , des portraits, protégé par les nôtres.

OPRE ROMA !
ROMALE, TCHAVOLE !

LATCHO DROM !

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